Je te laisse, j’ai un double appel !

Peut-être as-tu vu passer les publicités pour les forfaits téléphoniques 5G. A Noël, elles étaient partout ! 

La 5G est une nouvelle technologie mobile qui devrait permettre le développement de nouveaux usages pour nos objets numériques, grâce à un débit plus rapide. D’un point de vue technique, « développer la 5G » signifie utiliser des bandes de fréquences hertziennes encore non-utilisées, à savoir, dans un premier temps, les fréquences comprises entre 3,4 et 3,8 GHz. 

A l’été 2020, le président de la République Emmanuel Macron avait fait scandale en comparant les opposants au développement de la 5G au modèle « Amish » . Le sujet fait débat, et certains demandent même un moratoire  sur cette technologie, compte tenu de ses impacts controversés sur l’environnement et sur la santé. 

En France, la téléphonie mobile fait l’objet d’un encadrement juridique précis. 

De l’Union Européenne à ton maire, tout le monde joue un rôle ! Comme très souvent en droit de l’environnement, plusieurs institutions se partagent les compétences.

pastedGraphic.png

C’est quoi une compétence ? 

Une compétence est la faculté, pour une institution ou une administration, d’émettre des actes juridiques qui créent du droit – et qu’il faut ensuite appliquer.

Les compétences sont souvent bien définies par les textes légaux : chaque institution a un pouvoir de décision dans un champ bien précis. 

Par exemple, c’est le maire qui est compétent pour délivrer les permis de construire sur sa commune. Pas ton voisin, ni le préfet 😉

pastedGraphic.png

Alors, quel chemin juridique a été emprunté pour que tu puisses capter la 5G sur ton Iphone 12 ?

L’Union Européenne : elle est à l’initiative 

C’est l’Union Européenne (UE) qui est à l’initiative. Peut-être commences-tu à être familier du rôle que joue l’UE en droit de l’environnement : elle a souvent un rôle dans l’homogénéisation des pratiques sur le continent. 

L’UE prévoit que les Etats membres devront avoir déployé la 5G sur leur territoire pour le 31 décembre 2020 : c’est-à-dire qu’elle devra être disponible dans tous les Etats. L’UE prévoit ça dans une directive.

Cette directive date du 11 décembre 2018 : cela laissait donc un peu plus de deux ans aux Etats membres pour développer cette technologie. 

C’est donc l’Union Européenne qui lance le projet. 

  • L’Etat : il applique le droit européen 

Face à cela, l’Etat transpose cette directive. L’arrêté ministériel du 30 décembre 2019  fixe la manière dont les fréquences 5G vont être attribuées entre les différents opérateurs, ce qui permet de lancer le développement de la 5G en France. 

Après l’UE qui lance le projet, on a donc l’Etat qui attribue les fréquences 5G aux opérateurs.

pastedGraphic.png

La transposition du droit européen, qu’est ce que c’est ? 

C’est un sujet très important. 

Une directive est une « loi » prise par les institutions de l’Union Européenne qui donne des objectifs à atteindre par les pays membres et qui fixe pour cela un délai. Elle harmonise les lois des 27 pays membres de l’Union européenne tout en leur laissant une grande marge de manœuvre.

Pour que les directives soient respectées, les États membres ont l’obligation de les « transposer » dans leur droit national, c’est-à-dire de prendre des mesures concrètes pour mettre en œuvre leurs objectifs. La transposition est la « traduction » du droit européen en droit français ! Ce processus s’effectue à chaque fois que l’Union Européenne publie une directive. 

pastedGraphic_1.png

  • L’ARCEP, « le gendarme des télécoms » : elle encadre et régule

L’Etat et ses administrations n’agissent pas seuls, et dans le domaine de la téléphonie mobile, ils délèguent de nombreuses missions à l’ARCEP. 

L’ARCEP est une autorité administrative indépendante : c’est une institution qui régule un secteur déterminé, en l’occurrence les communications électroniques. Dans le langage courant, on parle du « gendarme des télécoms ». 

En tant qu’autorité administrative indépendante, l’Etat lui transfère la mission de gérer et de réguler l’usage des fréquences radiotéléphoniques. Dans le cas de la 5G, l’ARCEP a eu pour mission de mettre aux enchères les fréquences 5G, afin que les opérateurs téléphoniques se positionnent pour les acheter et les développer. 

Le 12 novembre 2020, l’ARCEP a ainsi pris quatre décisions qui autorisent les opérateurs Orange, Bouygues Telecom, SFR et Free Mobile à utiliser des fréquences 5G. 

C’est ce qui explique que la 5G ait commencé à se développer à la fin de l’année 2020 en France.

pastedGraphic.png

L’ANFR

Dans le secteur de la téléphonie mobile, une autre autorité a un rôle important : l’ANFR. Elle est également un autre « gendarme » : elle régule notamment les niveaux d’exposition aux ondes auxquels les opérateurs doivent se conformer. C’est aussi elle qui donne l’autorisation aux opérateurs de construire des antennes relais.pastedGraphic.png

  • Les municipalités : elles informent les habitants… et ne s’opposent pas

Enfin, les municipalités ont un rôle à jouer puisque c’est sur leurs territoires que sont installées les antennes relais nécessaires au développement de la téléphonie mobile !

Sans surprise, pour développer la 5G, les opérateurs doivent construire des antennes-relais ou bien modifier celles déjà existantes. 

Dans le cas où une antenne relais doit être construite, l’opérateur en charge du projet doit obtenir deux autorisations : une de la part de l’ANFR, et une de la part du maire de la commune. Il faut aussi que l’opérateur mette à disposition des habitants un dossier d’information.

Cette autorisation du maire est un peu particulière : en réalité, le maire rend une décision de non-opposition. Il s’abstient ainsi de s’opposer à l’installation de l’antenne relais. L’opérateur obtient alors une déclaration préalable de travaux, qu’il doit afficher sur un panneau dédié à l’endroit de construction de l’antenne. A la suite de cela, l’antenne peut être construite.

  

Dans le cas où l’antenne relais doit être modifiée – mais existe déjà – pour pouvoir émettre en 5G, le maire n’a pas à délivrer d’autorisation. L’opérateur doit tout de même obtenir une autorisation de la part de l’ANFR et doit toujours déposer en mairie un dossier d’information un mois avant le début des travaux. 

En conclusion, et comme tu as pu le constater, le développement de la 5G implique de nombreux acteurs. Tous ont un rôle déterminé, et se complètent. Peut-être serons-nous d’accord pour conclure que cela rend ce cadre juridique assez complexe !

_______

1 –  Pour en savoir plus, l’ARCEP a publié une note explicative sur le sujet : https://www.arcep.fr/nos-sujets/parlons-5g-toutes-vos-questions-sur-la-5g.html 

2 –  Si tu as loupé cet épisode politique de l’été dernier : https://www.leparisien.fr/politique/macron-se-fait-le-champion-de-la-5g-face-au-modele-amish-14-09-2020-8384760.php

3 – C’est-à-dire une interdiction temporaire au développement de la 5G dans l’attente d’études sur les impacts sanitaires et environnementaux de cette technologie. 

4 – Seul Iphone, à ce jour, qui puisse capter la 5G. 

5 – Directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen, article 54.

6 –Arrêté du 30 décembre 2019 relatif aux modalités et aux conditions d’attribution d’autorisations d’utilisation de fréquences dans la bande 3,5 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un système mobile terrestre

7 – Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes. https://www.arcep.fr/

8 – Décisions n°2020-1254, n°2020-1255, n°2020-1256, n°2020-1257 de l’ARCEP. Elles sont consultables sur cette page de l’ARCEP qui explique le processus des enchères : https://www.arcep.fr/la-regulation/grands-dossiers-reseaux-mobiles/la-5g/frequences-5g-procedure-dattribution-de-la-bande-34-38-ghz-en-metropole.html 

9 –Agence nationale des fréquences. https://www.anfr.fr/accueil/ 

10 –C’est l’article L34-9-1 du Code des postes et des télécommunications qui définit cette procédure. 

Partagez l'article

Facebook
Twitter
WhatsApp
Email

Plus
D'articles