Récap’ de quelques mesures estivales (2/2) – Besoin d’air ?

Pour bien démarrer le mois de septembre 2021, Robin des droits revient sur deux nouveautés parues pendant l’été. Voici la deuxième.

Besoin d’air ?

L’Etat français a été condamné le 4 août 2021[1] à payer une astreinte de 10 millions d’euros à plusieurs établissements publics et associations conduisant des actions de lutte contre la pollution atmosphérique[2]. Cette décision s’inscrit dans la lignée de deux autres décisions dans la même affaire.

Par un premier arrêt du 12 juillet 2017[3], le juge prescrivait au Premier ministre et au ministre chargé de l’environnement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre, pour certaines zones géographiques[4], un plan relatif à la qualité de l’air permettant de ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites dans le délai le plus court possible.

Par un deuxième arrêt du 10 juillet 2020[5], le Conseil d’Etat (le juge) observait notamment, d’une part, que le Gouvernement avait pris des feuilles de route qui précisaient pour chaque zone concernée « une liste d’actions concrètes à mener, destinées à réduire les émissions de polluants, leur échéancier de mise en œuvre et les moyens à mobiliser ». Mais ces feuilles de route ne comprenaient « aucune estimation de l’amélioration de la qualité de l’air qui en est escomptée, ni aucune précision concernant les délais prévus pour la réalisation de ces objectifs », ce qui est contraire aux exigences européennes. D’autre part, le juge notait que pour toutes les zones géographiques concernées sauf deux[6], la révision des plans de protection de l’atmosphère n’avait pas été initiée ou était seulement en cours. Quant au plan de protection de l’atmosphère d’Ile-de-France, adopté le 31 janvier 2018, celui-ci fixait à 2025 l’objectif d’atteinte des seuils limites de concentration des polluants. Or, le juge considérait que ce délai était trop important, le Gouvernement ne démontrant pas en quoi la période de dépassement des valeurs limites serait ainsi la plus courte possible.

Cette deuxième décision donnait six mois à l’Etat pour se conformer avec la première décision du 12 juillet 2017, faute de quoi il serait condamné à payer une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Être condamné à payer une astreinte, cela signifie qu’il faut payer une certaine somme d’argent dans le cas où on ne respecterait pas ce que le juge nous ordonne de faire.

C’est désormais chose faite. Le Conseil d’Etat a estimé le 4 août 2021 que l’Etat français n’a toujours pas exécuté de manière complète la décision du 12 juillet 2017 le condamnant à prendre des mesures pour lutter contre la pollution de l’air. Il juge que « si l’ensemble des mesures mises en avant par la ministre devraient avoir pour effet de poursuivre l’amélioration de la situation constatée à ce jour, les incertitudes entourant l’adoption ou les conditions de mise en œuvre de certaines d’entre elles ainsi que l’absence d’évaluation fiable de leurs effets dans les zones concernées ne permettent pas (…) de considérer qu’elles seront de nature à mettre un terme aux dépassements encore constatés ou de consolider la situation de non-dépassement dans les ZAG  Lyon, Paris, Aix-Marseille, Grenoble et Toulouse Midi-Pyrénées, s’agissant des taux de concentration en dioxyde d’azote, et dans la ZAG Paris, s’agissant des taux de concentration en  particules fines PM10, dans un délai qui puisse être regardé comme le plus court possible ». En conséquence, l’État doit payer 10 millions d’euros à des établissements publics et associations, dont Les Amis de la Terre. Le montant de l’astreinte est répartie entre les établissements publics et les associations pour éviter qu’une somme si importante n’enrichisse de manière inconvenable une seule association, et parce que l’ensemble des acteurs bénéficiant de l’astreinte conduisent des actions en matière de lutte contre la pollution atmosphérique et d’amélioration de la qualité de l’air.

 

***

 

[1] Conseil d’Etat, 4 août 2021, n°428409.

[2] 3,3 millions d’euros à l’ADEME (Agence de la transition écologique), 2,5 millions d’euros au CEREMA (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), 2 millions d’euros à l’ANSES, 1 millions d’euros à l’INERIS (Institut national de l’environnement industriel et des risques), 350 000 euros à Air Parif et Atmo Auvergne Rhône-Alpes chacune, 200 000 euros à Atmo Occitanie et Atmo Sud chacune et 100 000 euros à l’Association Les Amis de la Terre.

[3] Conseil d’Etat, 12 juillet 2017, n°394254.

[4] Grenoble Rhône-Alpes, Lyon Rhône-Alpes, Marseille Provence-Alpes-Côte-d’Azur, Montpellier Languedoc-Roussillon, Nice Provence-Alpes-Côte-d’Azur, Paris Ile-de-France, Saint-Etienne Rhône-Alpes, Strasbourg Alsace, Toulon Provence-Alpes-Côte-d’Azur, zone urbaine régionale (ZUR) Champagne-Ardenne, Toulouse Midi-Pyrénées, ZUR Rhône-Alpes et ZUR Martinique.

[5] Conseil d’Etat, 10 juillet 2020, n°428409.

[6] Le plan de protection de l’atmosphère de la Vallée de l’Arve a été adopté le 29 avril 2019 et le plan de protection de l’atmosphère de l’Île de France l’a été le 31 janvier 2018.

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