Le « Greenwashing », tu connais ?

Vous aussi vous avez remarqué que la protection de l’environnement devient un argument marketing ? 

 

« Durable », « responsable », « naturel », et j’en passe ! Les publicités à la télévision, les panneaux publicitaires aux abris-bus, dans le métro, sur nos trottoirs… Les produits qui sauvent la planète sont légion !

 

Quelles sont les règles qui encadrent l’utilisation de telles mentions ? Robin des droits vous éclaire !

 

Actuellement, aucune règle juridique ne régit ou ne sanctionne ce qu’on appelle – en bon français – le « greenwashing ».  

 

Ce thème intéresse néanmoins, depuis plusieurs années, les parlementaires et le Gouvernement, qui sont tous deux susceptibles de proposer des textes de loi pour encadrer une telle pratique. 

 

1.     Les règles juridiques existantes

Plusieurs règles permettent déjà d’encadrer les techniques marketing malveillantes. Elles visent à protéger la planète, mais surtout à nous protéger nous, en tant que consommateur. 

Le droit de l’environnement

 

En février 2020, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a imposé des obligations aux entreprises afin qu’elles informent les consommateurs sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits. 

 

Cette information environnementale devra porter sur « l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité et la présence de substances dangereuses, de métaux précieux ou de terres rares ».

 

Une entreprise qui ne respecterait pas cette obligation d’information risquerait une amende de 15 000 euros.

 

Une telle information environnementale a justement pour objectif de lutter contre le « greenwashing ». C’est logique : si le producteur partage des informations sur son produit, le consommateur pourra juger lui-même si celui-ci est bon pour la planète !

 

Il faudra toutefois attendre janvier 2022 pour que cette mesure s’applique. 

 

Le droit de la consommation

 

Certaines règles protègent spécifiquement les consommateurs, considérés comme la partie faible dans la relation les liant aux professionnels. A ce titre, les entreprises qui appliquent des pratiques commerciales qui visent à tromper le consommateur sont sanctionnées. 

 

Une publicité est considérée comme trompeuse lorsqu’elle repose sur des indications fausses ou qui sont de nature à induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques essentielles du produit. 

Ainsi, si une entreprise fait croire que le jus de fruits qu’elle commercialise est 100% fruits, alors qu’il est additionné d’eau, elle peut être sanctionnée. 

Plus concrètement, si une entreprise diffuse de fausses informations, ou des informations qui induisent le consommateur en erreur pour augmenter ses ventes, elle peut être punie d’une amende allant jusqu’à 1 500 000 euros ou jusqu’à 10% du chiffre annuel moyen, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit. D’autres peines peuvent également être prononcées par le juge, comme l’interdiction d’exercer pour le dirigeant de la société, ou l’affichage de la décision. Ça fait peur, n’est-ce pas ? 

 

Les entreprises pratiquant le « greenwashing » peuvent donc être condamnées pour  ce que nous, les juristes, appelons une « pratique commerciale trompeuse ». 

Par exemple, l’entreprise Monsanto, qui commercialise l’herbicide « Roundup », à base de glyphosate a été condamnée à 15 000 euros d’amende pour avoir présenté ce produit comme étant « biodégradable » et rendant le sol « propre ». 

 

C’est ce qu’indiquent également les communications de l’entité dédiée à la répression des fraudes, la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (la « DGCCRF »). Cette direction est notamment chargée de lutter contre les pratiques commerciales trompeuses. Or depuis 2015, elle enquête sur les allégations environnementales. On peut donc dire que les entreprises risquent gros !

 

Pourtant, force est de constater qu’elles sont nombreuses à nous faire croire au caractère inoffensif de leurs produits sur l’environnement. Encore une fois, il s’agit surtout d’un problème de moyens ! Les agents de la DGCCRF ne sont pas suffisamment nombreux…

 

2.     La récente proposition de loi qui sanctionne le « greenwashing »

 

Souvenez-vous, Robin des droits vous a parlé du projet de loi « Climat et Résilience », en long en large et en travers. 

 

Et bien figurez-vous qu’une députée a proposé d’inscrire dans la loi la définition du « greenwashing » – ou plus précisément « blanchiment écologique » – et de le sanctionner expressément. 

 

La députée LaRem Aurore Bergé, rapporteure du projet de loi, a proposé de punir le fait de laisser entendre ou de donner l’impression, alors que c’est faux, qu’un bien ou un service a :

      un effet positif sur l’environnement, ou

      n’a pas d’incidence sur l’environnement, ou 

      qu’il est moins néfaste que d’autres produits. 

 

Une telle pratique serait assimilée à une pratique commerciale trompeuse, dès lors que l’information donnée par l’entreprise qui commercialise le produit est fausse. 

 

La députée propose de punir l’entreprise responsable d’une amende dont le montant pourra être porté, en plus des sanctions déjà prévues, à 80 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité. 

L’entreprise devra également systématiquement afficher la décision le sanctionnant sur son site internet ou par exemple, en la diffusant dans la presse écrite. Cette obligation d’affichage vise à atteindre la réputation de l’auteur du « greenwashing ». 

 

Mais, si la loi sanctionne déjà le « greenwashing », cet amendement est-il utile ?

 

Nous vous l’avons expliqué dès le début de l’article : en principe, le « greenwashing » est déjà puni par la loi. 

 

Toutefois, celui-ci n’est pas clairement défini, ce qui peut parfois entraîner des incertitudes concernant certaines situations. 

 

Par conséquent, si l’ajout dans la loi d’une disposition sanctionnant expressément le « greenwashing » n’aura pas un effet révolutionnaire, il aura le mérite de rappeler avec clarté aux entreprises, que cette pratique peut être illégale ! 

De la même manière, puisque le législateur a décidé de mettre le projecteur sur une telle pratique, les agents chargés de la répression des fraudes et les juges auront tendance à être plus vigilants. Les enquêtes et sanctions seront alors certainement plus nombreuses. A voir !

Enfin, si la proposition de la députée est votée et adoptée définitivement, les sanctions seront plus sévères.

Adieu le « greenwashing » ?

 

_____

1 – Article L.541-9-1 du code de l’environnement.

2 – Article L.541-9-4 du code de l’environnement. 

3 – Article L.121-2 du code de la consommation. 

4 – Cour de cassation, chambre criminelle, 4 mars 1976, n°75-91.924.

5 – Articles L.132-2 du code de la consommation et 131-8 du code pénal. 

6 – Article 131-39 du code pénal. 

7 – Cour de cassation, chambre criminelle, 6 octobre 2009, n°08-87.757.

8 – https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/enquete-sur-allegations-environnementales-globalisantes

9 – Le rapporteur d’une loi est un député désigné pour analyser en détail le texte,  présenter ses opinions et faire des observations. 

10 –Article 4 bis B du projet de loi Lutte contre le dérèglement climatique, tel qu’adopté à l’Assemblée nationale en première lecture. 

 

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